Les avions à décollage et atterrissage vertical
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V. Tail-sitter à moteur-fusée.
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Création/Mise à jour : 26/09/2003 |
(crédit photo ci-contre : Marek Rys's Luft '46 images ) |
Les appareils de cette catégorie ne sont pas à proprement parler des VTOL, mais des VTO car s’ils devaient décoller verticalement, l’atterrissage devait se faire d’une manière plus ou moins classique (voir pas d’atterrissage du tout avec le A-9 !). Ce type d’appareil a cependant un intérêt historique indéniable puisque le Ba-349 fut le premier avion piloté à décoller verticalement (même s’il ne réalisa cet exploit qu’une seule fois et avec la mort du pilote comme tragique conséquence). Le concept fut d’ailleurs repris dans les années cinquante avec les divers essais Américains et Soviétiques de lancement d’intercepteurs sur rampe inclinée et assistés par boosters (voir article sur le B-61 Matador). Ces « Tail-sitter » à moteurs-fusée ne furent étudiés lors de la seconde guerre mondiale que par les allemands qui étaient prêt à tester les solutions les plus extrêmes et ne disposaient que des moteurs-fusée Walter HWK 109 (éprouvé sur le Me-163 Komet) et celui du A-4 (V-2) comme moyen de propulsion assez puissant. Les applications envisagées étaient les intercepteurs de défense de site Ba-349 et Heinkel P1077 à mi-chemin entre l’avion et le missile sol-air et, encore beaucoup plus extraordinaire pour l’époque, la reconnaissance et le bombardement stratégique avec les A-6 et A-9. L’arrivée de turboréacteurs et de turbopropulseurs assez puissants mis fin à ce concept qui ne répondait pas de toute façon aux besoins exprimés par les états majors puisque le problème du terrain d’atterrissage restait entier. Heinkel P1077 "Julia": Au printemps 1944, le RLM publia des spécifications pour un petit intercepteur de défense de zone. Après évaluation des projets Messerschmitt P.1104, Heinkel P1077 "Julia" et Junkers EF 127 "Dolly", les deux propositions retenu pour le développement furent le P1077 et le EF-127. Cependant, Erich Bachem proposa un autre appareil (le Ba-349 Natter) qui était un intercepteur semi-consommable intermédiaire entre un véritable intercepteur et un missile sol-air. La proposition de Bachem fut d’abord rejeté en raison de son caractère extrême puis accepté après des manœuvres de lobbying de Bachem auprès de Himmler. Le NP-20 de Bachem devait être déployée d'une manière semblable au "Julia" mais était moins complexe à utiliser pour le pilote et gagna finalement le contrat de production. Ces appareils étaient des avions à bas coût, conçu en matériaux non stratégiques et qui pouvaient être assemblés par des ouvriers peu qualifiés. Grâce au lancement à partir de rampe verticale, ils pouvaient être installés autour des cibles stratégiques et lancées contre les bombardiers alliés. Les Heinkel P1077 et Junkers EF 127 étaient conçus autour du moteur-fusée Walter 109-509C ainsi que le NP-20 initial. |
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Au début de l'été 1944, W. Benz et le Dr. Gerloff commencent les études de développement du nouvel appareil. Des documents datés du 19 août 1944 montre un petit avion à moteur-fusée de formule « tail-sitter » bi-dérive avec un fuselage presque circulaire. La propulsion proposée était un moteur-fusée Walter HWK 109-509C qui comportait des chambres de combustion séparées pour le décollage (1700 kg de poussée) et la croisière (300 kg de poussée) et, montés de chaque côté du fuselage, deux ou quatre boosters d’appoint Schmidding 533 (1000 kg de poussée chacun pendant 12 secondes) pour le décollage. Les skis et les saumons d'aile renforcés devaient coulisser dans les rails-guide de la rampe de lancement qui pivotait sur sa base pour permettre à l'avion d'être « chargée » en position horizontale. Les boosters Schmidding étaient largués automatiquement après usage et l'accélération initiale ne devait pas dépasser 2 g. Un pilote automatique trois-axe assurait automatiquement le guidage de l'intercepteur dès que les boosters étaient largués. Le pilote devait déconnecter le pilote automatique et passer en commande manuelle à environ deux ou trois kilomètres de la formation de bombardier qu'il devait attaquer. Ce pilote automatique servait également à diriger l’appareil sur la bonne trajectoire en cas d’évanouissement du pilote au décollage le temps que le pilote retrouve ses esprits ! L'armement était composé de deux canons spéciaux MG 151/20. L’appareil construit en bois faisait 6.98 mètres de long, 4.6 mètres d’envergure et 2.0 mètres de hauteur. Le 8 septembre 1944, le ministère de l'aviation allemand (RLM) commande la construction de 20 prototypes. Heinkel transfère alors la construction des prototypes aux ateliers de Vienne. En plus des techniciens, ouvriers et charpentiers, l’équipe du P.1077 était constituée du chef pilote Ludwig Hoffman, la conception étant assurée par le professeur Schrenk et l’ingénieur Kottner sous la direction de W. Benz. En octobre 1944, des ordres sont donnés pour construire 300 machines par mois. Heinkel proposa plusieurs versions du « Julia », par exemple une version avec quatre boosters d’appoint fixés sur les côtés du fuselage, un moteur-fusée Walter amélioré et quatre canons MG 151/20 montés en pod à la place des Mk-108. |
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Une autre variante, codé « Julia II », avait deux skis pour l’atterrissage et un pilote en position assise normale. Une version simplifiée du "Julia", codé "Romeo", fut également envisagée avec un pulsoréacteur à la place du moteur fusée. Le Julia était un monoplace avec une structure en bois extrêmement simple et une envergure de seulement 4.6 mètres (surface alaire de 7.21 m2). Le Julia I avait une masse de 1800 kg au décollage (après largage des boosters) et une charge alaire de 249 kg/m2. Quant au « Julia II », avec pilote assis de manière conventionnelle, il avait une masse en vol légèrement supérieure avec 1840 kg. L’appareil embarquait 222 kg de C-Stoff (un mélange de méthanol et d’hydrazine) et 700 kg de T-Stoff (un puissant oxydant : peroxyde d’hydrogène à 80 %). Une fois le carburant et les munitions consommés, le retour à la base en vol plané était effectué à une masse d'environ 725 kilogrammes. L'atterrissage était fait sur un train à skis munis d’amortisseurs oléopneumatiques, la partie avant des skis, située sous l'habitacle, était déployée pour absorber l'impact initial. L'armement comportait deux canons de 30 mm Mk 108, montés sur les cotés du fuselage avant avec soixante obus par armes, et qui tiraient avec un angle de +8,6 degrés par rapport à l'horizontal. Les calculs de performances prévoyaient une vitesse maximale de 980 km/h à 5000 mètres et une vitesse ascensionnelle initiale de 12 000 mètres par minute. Une altitude de 5000 mètres pouvait être atteinte en 31 secondes et une altitude de 15 000 mètres en 72 secondes. La distance franchissable sur la poussée de la chambre de croisière était d’environ 65 kilomètres à 800 km/h. Le 26 octobre 1944, Heinkel décide de construire la version avec le pilote installé en position allongé. Par rapport aux études préliminaire, le fuselage était inchangé, les ailes gardaient leur forme rectangulaire pour faciliter la production en série. Par contre le stabilisateur vertical bi-dérive était abandonné en faveur d’une dérive classique. |
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Le décollage du « Julia » se faisait verticalement puis l’appareil atterrissait en vol plané sur des skis au contraire du Bachem "Natter" qui était partiellement récupéré par parachute en vue d’une éventuelle récupération de certains éléments. Heinkel proposa également une version du « Julia » à décollage conventionnel qui utilisait un chariot largable à trois roues très semblable à celui proposée pour le Junkers EF 127 et qui permettait avec les quatre boosters Schmidding de décoller en moins de 350 mètres. En octobre 1944, le développement se poursuivait sur une maquette volante au l/20. Au même moment, Heinkel proposa de produire le P-1077 avec le pilote assis de manière conventionnelle, un empennage modifié, et des ailes plus épaisses et de plus petite envergure. Finalement, il fut décidé de produire les deux versions. Vers la fin 1944, les essais de vitesse et d’atterrissage avec les modèles réduit étaient achevés ainsi que des essais de différente configuration d’empennage. Après une attaque aérienne sur les ateliers de Vienne et la destruction de la maquette d’aménagement et de divers composants des prototypes, Heinkel décide d’installer l’atelier de construction des cinq premiers prototypes à KremsMonau ou un personnel très qualifié venait d’achever le premier He 162. Heinkel décida d’améliorer l’appareil en changeant la configuration du train à skis, en installant un siège éjectable et en rallongeant le fuselage pour loger un réservoir de carburant plus grand. Finalement, Heinkel put lancer la fabrication de deux prototypes non motorisés et deux équipés de leur moteur-fusée Walter. Les deux prototypes non motorisés étaient achevés à 90% au moment de l’abandon du programme. Bachem Ba-349 "Natter" : Le Bachem Ba-349 "Natter" était un VTO capable d'une seule mission pour la défense aérienne des grands centres. Armé de 24 roquettes de 73 mm logées dans le nez, il atteignait une altitude de 12000 mètres, où il prenait le vol horizontal à la vitesse de 990 km/h. Puis il plongeait sur les formations ennemies et détruisait autant d'avions qu'il le pouvait avec ses 24 roquettes.
Alors le pilote sautait en parachute et l'avion était partiellement récupéré par parachute. Toute l'affaire tenait en 3 ou 4 minutes. Selon ce concept, la construction était des plus élémentaires tant par sa forme que par la simplicité de son assemblage ; son ossature était en bois collé et cloué. C'était essentiellement un bâti support pour un moteur-fusée, un poste de pilotage et une batterie de roquettes dans le nez. La longueur était de 5,70 m et l'envergure de 3,40 m, le poids d'une tonne et demie au décollage. Le moteur-fusée était le même que celui du He P1077, avec deux fusées d'appoint pour faciliter le décollage. |
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La Société Bachem lança le projet en septembre 1944. Des prototypes furent réalisés et dès novembre les essais commencèrent à Neuberg, près de Sigmaringen, par des vols en remorque derrière un Heinkel He-111, pour démontrer la navigabilité de la cellule. En février 1945, la SS exigea une progression plus rapide et un vol piloté. Le constructeur nourrissait quelques doutes quant à la sagesse de cette décision hâtive mais il préféra ne pas se mettre la SS à dos. Aussi donna-t-il son accord et le prototype fut mis en état de vol, pilote à bord. Les fusées furent allumées. A une hauteur de 100 mètres environ, le cockpit se désintégra et le pilote fut tué. L'avion continua son ascension sur une soixantaine de mètres, passa sur le dos et continua à monter jusqu'à près de 500 mètres. Puis il fit un retournement, piqua vers le sol et explosa à l'impact. Il y eu 30 Natters construits en tout. Dix-huit servirent aux essais de décollage en remorque ; un s'écrasa au sol lors du vol piloté, six furent incendiés pour ne pas qu'ils tombent intacts entre les mains des Alliés. Les quatre derniers furent capturés en Autriche par les forces américaines. |
(crédit photo ci-contre : Marek Rys's Luft '46 images ) |
Les A-6 et A-9 : L'extraordinaire augmentation de portée atteinte après l'installation d'ailes sur l'A4 (V2), conduisit Werner Von Braun à concevoir trois avions fusée pilotés. L'A4b, équipé comme un appareil de recherche aérodynamique, l'A9, un bombardier intercontinental et l'A6, un appareil de reconnaissance haute altitude et haute vitesse. En fait, les applications militaires de ces programmes de recherche scientifique furent commandées dans le but d'obtenir les renseignements nécessaires en temps de guerre. L'A6 aurait dû être un programme de recherche hypersonique, comprenant un statoréacteur auxiliaire, seulement utilisé aux très hautes vitesses. Ceci était prévu sur cet appareil à l'apogée de la trajectoire, à très haute vitesse et après épuisement du carburant du moteur fusée principal. Le statoréacteur (brûlant du pétrole synthétique) donnait alors à l'A6 la possibilité de continuer son vol pour vingt ou trente minutes supplémentaires sans perte de vitesse ou d'altitude. L'A6 aurait été impossible à intercepter, mais ses caractéristiques de vol était largement au-dessus des possibilités de l'époque et le projet fut rejeté par le German Air Ministry. L'A6 aurait dû être équipé avec un cockpit pressurisé, un train d'atterrissage et un parachute de freinage. Il devait être lancé verticalement comme l'A4 et atterrir classiquement par ses propres moyens. A la fin de 1944 le gouvernement allemand commandait des études pour étudier la possibilité d'un avion-fusée de bombardement du territoire américain (Nom de code Projekt Amerika). Les deux versions (ailé et corps portant) furent référencées par le "German reference material" comme le A-9. Initialement la possibilité de lancer des A-4 (V-2), à partir de sous-marins classe XXI fut étudié, mais en raison de la puissante défense anti-submersible de la côte Est le projet fut reporté en faveur du A-9. Au début de 1940, le projet se présentait comme un avion fusée à deux étages appelé A-9/A-10. Quand les USA entrèrent en guerre, le projet fut soudainement et inexplicablement abandonné au stade des études théoriques. Ce fut tout de même la première étude sérieuse de missile intercontinental. Extérieurement, le projet se présentait comme un A4 (V2) agrandit. Le premier étage devait être l'A-10 avec un temps de fonctionnement de 50 secondes. Deux versions furent envisagées, la première utilisant un faisceau de 6 moteurs de V2 avec une tuyère commune, La deuxième, un seul moteur fusée plus puissant. Après le fonctionnement du premier étage, le second se séparait et prenait le relais. Au départ, il fut prévu d'utiliser soit un V2, soit un A4b non piloté (V2 avec des ailes), et avec une poussée atteignant 30 tonnes. L'altitude maximale atteinte par le deuxième étage culminait à 330 km et la vitesse après extinction des moteurs était calculée à 10200 km/h ! La masse maximale au décollage était estimée à 85 tonnes. Si un deuxième étage ailé était utilisé, la portée maximale était de 4800 km avec une charge militaire d'une tonne. Avec cette portée, Washington et New York aurait pût être attaqués depuis des sites en Europe. L'A9 était un dérivé du programme A4b piloté. Des essais en soufflerie montrèrent que les ailes type "delta" réduisait substantiellement la traînée et augmentait la portée. En raison du faible développement des équipements de guidage de l'époque, l'A9 devait être piloté pour atteindre ses cibles. Après avoir atteint sa cible, le pilote était censé s'éjecter de l'appareil et s’il survivait il devait s'attendre à être fait prisonnier ! |
Sources : 1) X-planes de Jay Miller |
Les avions à décollage et atterrissage vertical |